Chirurgie esthétique : quand les chirurgiens disent « non »

Chirurgie Esthétique
Des mauvaises indications aux envies obsessionnelles, les chirurgiens refusent-ils de pratiquer certaines opérations ? Deux spécialistes jouent la carte de la transparence et nous répondent.

Tous les médecins le disent : une intervention de chirurgie esthétique se pratique sur un individu en bonne santé. Au-delà de cette raison, tour d'horizon des motifs qui poussent les chirurgiens plasticiens à dire non.

Ma demande n’est pas justifiée

"J'ai 35 ans, mais mon visage commence à se marquer. Je viens vous voir pour un lifting." La réponse sera non, trop jeune, trop tôt. Le geste est lourd, le bénéfice faible pour cette personne. Le chirurgien oppose toujours les avantages aux risques et désagréments d'une opération. Avant d'envisager un geste chirurgical, le chirurgien est d'abord là pour conseiller et savoir dire non quand l'acte n'est pas indispensable, voire inutile et dangereux.

Attention aux critères normatifs de jeunesse ou de beauté, un petit défaut peut être charmant.

Je me trompe d'indication

"Le bas de mon visage a vieilli, je voudrais un lifting." Le chirurgien, quant à lui, remarque les poches sous les yeux qui alourdissent le regard. Avec tact, il essaie de réorienter la demande pour obtenir un résultat esthétique satisfaisant.

"Je grossis depuis deux ans, je n'arrive pas à maigrir. Je veux une chirurgie esthétique." Mieux vaut s'adresser d'abord à un médecin nutritionniste, puis consulter un chirurgien esthétique. Certaines idées reçues ont la vie longue. Une liposuccion ne fait pas maigrir, mais efface des rondeurs localisées. Pas plus qu'un lifting n'enlève les rides : il corrige le relâchement cutané d'un visage.

Ma demande n’est pas raisonnable

"Je veux le nez de Claudia Schiffer, je le trouve superbe. Regardez, je vous ai apporté sa photo." C'est très rare que la forme d'un nez, même célèbre, s'intègre à la morpho-psychologie d'un autre visage. Des arguments techniques justifient aussi ce refus. Les structures osseuses et cartilagineuses diffèrent d'un individu à l'autre. Une photo renseigne le chirurgien sur le désir de son patient, mais pas plus.

Si la personne comprend cela, elle pourra - aidée par le spécialiste - préciser ce qui lui déplaît dans son nez.

Ce dialogue conduit parfois à l'opération. Déraisonnable également, la modification excessive. Beaucoup de chirurgiens refusent désormais de pratiquer une chirurgie qui se voit trop, qu'ils estiment peu harmonieuse. Cela ne correspond pas à ce qu'ils peuvent faire ou ce qu'ils veulent faire.

Je ne sais pas ce que je veux

"Mon visage me déplaît docteur, que feriez-vous ? C'est à vous de me dire ce qui ne va pas." La demande manque de clarté. Elle est insuffisante pour que le spécialiste comprenne le désir de son patient. « Si la personne est incapable de structurer sa demande, d'exprimer ce qui la gêne, je ne prends pas la décision de l'opérer », indique le Dr Stéphane Pinard. On a parfois du mal à trouver les mots justes.

Dans ce cas, le chirurgien affine la demande et propose une intervention. Mais il ne se substitue pas à son patient qui, seul, définit son "objectif" esthétique.

Je ne supporte pas de me voir dans la glace ou sur une photo

Incapable de voir son visage ou son corps, tout en désirant une intervention esthétique ? Comment, dans ce cas, identifier ce qui dérange ? Il ne faut pas se mentir, cette réaction traduit une grande difficulté à s'accepter.

Le chirurgien devine une fragilité psychologique, un manque de confiance en soi. Il ne se sent pas capable, à juste titre, de répondre à une telle plainte. Certains adressent leurs patients vers un confrère psychologue. De même si la personne ambitionne de transformer son image pour nier ses origines, rompre ses attaches familiales.

Je ne le fais pas pour moi

"Je pense à la chirurgie esthétique pour faire plaisir à mon mari. Pour paraître plus jeune. Ou pour être plus pulpeuse." Il est rare que le chirurgien réponde à cette demande. L'intervention esthétique se décide pour soi, pas pour quelqu'un d'autre la vraie demande est personnelle.

Je veux plaire à mes petits-enfants. Le but est clair et cohérent, certains chirurgiens acceptent d'opérer ces grands-mères décidées. Au bout du compte, c'est pour elles qu'elles aspirent à rajeunir.

Docteur, opérez moi très vite

Pour être réussie, la chirurgie esthétique nécessite un long dialogue entre le patient et le chirurgien. Surtout quand il s'agit d'opérations qui transforment le visage. C'est parfois difficile de s'habituer à un autre nez ou un autre menton. A l'exception d'opérations peu traumatisantes - comme une petite liposuccion ou le rajeunissement des paupières supérieur- il faut prendre son temps. Pas de précipitation !

J’ai été opérée plusieurs fois ça ne me plaît toujours pas

Bien sûr, les erreurs ou défauts existent en esthétique. Le chirurgien les corrige. Mais certaines personnes multiplient les opérations, car elles ne sont jamais contentes du résultat de l'intervention. Ces personnes souffrent, leur demande devient obsessionnelle. Elles cherchent, de consultation en consultation, le chirurgien qui acceptera de les opérer à nouveau. C'est bien cela le problème, tous les chirurgiens ne savent pas dire non.

Je viens vous voir pour mon enfant

Des parents amènent leur enfant en consultation à cause d'oreilles décollées ou d'un nez peu gracieux. Si la plainte émane des parents uniquement, le chirurgien leur conseille d'attendre. « On opérera quand l'enfant le demande », leur répond Stéphane Pinard. Quand l'enfant ne le désire pas, il risque de mal le vivre. Le spécialiste accepte l'intervention s'il perçoit, en discutant avec l'enfant, que celui-ci est vraiment complexé par ses oreilles. Un nez s'opère rarement avant 17 ou 18 ans, les structures nasales continuent à croître pendant l'adolescence.

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