Fruits anciens méconnus ou oubliés d’Europe : un vrai succès !

panier de fruits
La prune abricot, la pomme orange ou la cerise amourette reviennent sur les marchés. Des variétés à redécouvrir, pour le plaisir de nos papilles.

Des variétés de fruits inconnues

Connaissez-vous la suzette ? Délicieuse à croquer, on ferait presque une indigestion de cette petite pomme rouge sang, rayée, dont la chair est dure et très sucrée. La suzette fait partie des 80 variétés de pommes anciennes que l'on peut trouver sur le catalogue de la pépinière d'arbres fruitiers du Conservatoire Végétal d'Aquitaine.

Aux côtés de la pomme orange, aux parfums d'orange, ou de la Belle fille de la Creuse, arrondie, à chair fine, croquante, sucrée, on découvre également la poire citron, la cerise Amourette, la Guindouhl du Tarn, la figue ronde de Bordeaux, la prune abricot, le brugnon café, ou les fraises Vicomtesse Héricard de Thury, issues d’une variété de fraisier de 1849.

La seule lecture du catalogue fait déjà saliver, ce qui explique sans doute la demande de plus en plus forte des consommateurs et des jardiniers amateurs pour des fruits anciens oubliés. Peu à peu retrouvés, ils sont à nouveau cultivés dans les vergers. « Nous avons vendu 24 000 arbres fruitiers l'année dernière et on a doublé nos ventes en quatre ans », constate Evelyne Moulin, directrice d’une jardinerie dans l’Isère.

Principalement présents sur les marchés locaux

Qui sait qu'il existe environ 20 000 variétés différentes de fruits en France ? Le fruit le plus incroyable étant la pomme, avec près de 10 000 variétés ! On dénombre aussi 3 000 à 3 500 variétés de poiriers, 1 200 de cerisiers, 900 de pêchers ou environ 400 fraisiers... C'est ce qui ressort de l'inventaire national des collections fruitières terminé, en juillet 2021.

Ces collections appartiennent en majorité à des associations dont certaines effectuent un travail remarquable dans toutes les régions de France, la plus active étant celle des Croqueurs de pommes créée en 1978 et désormais présente dans 53 départements. Mais il y a également les collections des centres de recherche ou d'enseignement, des conservatoires, des pépinières, des institutions publiques et même des indépendants passionnés.

Au total, dans toutes les régions de France, 253 vergers conservatoires abritent ce trésor végétal. Mais, pour l'instant, très peu de ces espèces sont cultivées pour être commercialisées. Excepté sur les marchés locaux ou dans les épiceries fines, les variétés anciennes de fruits sont encore rarement à l'honneur sur les étals.

Nous avons un patrimoine exceptionnel, avec des fruits fantastiques, mais nous ne l'exploitons quasiment pas. Évidemment, tous les fruits anciens ne sont pas intéressants et savoureux, mais on pourrait davantage se servir de ces variétés pour faire de nouvelles sélections de fruits adaptées au goût et à la demande des consommateurs aujourd'hui.

Des petites poires pour fabriquer du poiré

Plusieurs expériences ont déjà été couronnées de succès. Ainsi, en Normandie, des producteurs ont relancé la culture de petites poires spécifiques pour fabriquer du Poiré, une boisson pétillante, l'équivalent du cidre, fait, lui, avec des pommes. En Bourgogne, un passionné, a remis au goût du jour la fabrication de délicieux pruneaux à partir d'une prune qui avait presque totalement disparu.

Au Pays Basque, plusieurs agriculteurs ont relancé la commercialisation de la cerise d'Itxassou, une guigne douce, très sucrée et juteuse. Dans la même région, l'association Sagartzea a permis de replanter 15 000 pommiers de variétés anciennes et locales pour fabriquer du cidre. Créée en 1996, la coopérative Eztigar regroupe désormais 32 producteurs et produit 76 000 bouteilles d'un cidre typique du Pays Basque, le Sagarnoa.

Dans le Gers, l'Association gerçoise pour la promotion du foie gras élabore un produit spécifique, le Figuigers, en gavant les canards avec des figues sèches.

À Limoges, la chocolaterie Bussière élabore encore une recette vieille d'un siècle pour confire une petite prune locale, la Saint Léonard, qui se ramasse verte en juillet et reste très ferme à la cuisson.

Les consommateurs recherchent de nouvelles saveurs

A chaque terroir correspondent plusieurs variétés de fruits et des traditions culinaires qui mériteraient d'être encouragées pour développer un tissu économique local et maintenir la diversité gastronomique. À l'instar de ce qui fut réalisé dans les années 1950 pour sauver la prune d'Ente de la disparition et relancer la production du pruneau d'Agen.

Aujourd'hui, dans le Lot-et-Garonne, la prune d'Ente fait vivre 2 250 producteurs ! Malheureusement, la pérennité de ces collections d'arbres fruitiers est encore souvent liée à la volonté et à la motivation de quelques hommes qui n'ont pas toujours pu trouver de relais institutionnels. L'absence de reconnaissance officielle de cette action de sauvegarde du patrimoine fruitier est une des raisons majeures de la fragilité des collections.

Ce patrimoine essentiel risque donc à tout moment de disparaître, faute de crédit et d'intérêt. Ce qui est d'autant plus paradoxal que la demande pour les nouvelles variétés de fruits est forte.

En attendant, rien n'empêche les heureux propriétaires d'un carré de verdure de commander un arbre pour avoir le plaisir de produire et de manger leurs propres fruits issus de variétés gourmandes d'antan.

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