Psoriasis : comment bien vivre avec ? | Témoignage

Psoriasis
Bien sûr, c’est une maladie dont on ne meurt pas. Il n’empêche : pour les 2.5% à 5 % de Français qui vivent avec, le psoriasis est une épreuve. D’abord angoissée, puis révoltée, Sophie, 44 ans, essaie aujourd’hui de gérer ses crises avec sérénité.

Vivre avec le psoriasis en goutte : un défi quotidien

Je sais exactement ce qui a déclenché ma première poussée de psoriasis, il y a de ça neuf ans : une banale angine. Quinze jours après, des petites vésicules ressemblant à de minuscules gouttelettes d'eau sont apparues par plaques, lesquelles se sont progressivement rejointes. Mis à part le visage, la poitrine et le haut du dos, j'en étais couverte.

Non seulement elles me provoquaient des démangeaisons abominables, comme si j'avais été piquée par des milliers de moustiques, mais j'avais l'impression que ma peau fourmillait, bouillonnait et était parcourue de décharges électriques. Le diagnostic : un psoriasis en goutte, une forme assez rare à mon âge.

Cette crise, comme les suivantes, va durer un an et demi. Et à chaque fois, le même scénario se reproduit. À certaines périodes, ma peau est encore plus réactive : s'il fait chaud, par exemple, elle me gratte intensément ; s'il fait froid, elle se hérisse, se tend, semble rétrécir. Les plaques, d'abord rouges, blanchissent progressivement, puis elles se desquament.

Au moindre mouvement, au moindre frottement, des nuées de petites pellicules tombent et se déposent partout. J'ai renoncé à m'habiller en noir, car elles se verraient trop, ou à porter des vêtements moulants, car leur contact est insupportable. En hiver, je ne tolère ni les collants ni les lainages à même la peau.

Et même s'il fait chaud, je cache mes bras sous des tee-shirts à manches longues et je me mets rarement en jupe. Pas question, évidemment, de me faire épiler ou d'aller chez le coiffeur. Bref, la féminité en prend un sacré coup ! En outre, il faut se tartiner plusieurs fois par jour de crème hydratante pour éviter les tiraillements de la peau. Ce qui prend du temps et coûte beaucoup d'argent.

Le regard des autres est difficile à affronter

Les gestes de dégoût, les coups d'œil déplaisants, les questions malsaines... je sais ce que c'est. Il est difficile d'affronter le regard des autres. Quand par exemple j'accompagne mes enfants à la piscine, je sens la désapprobation générale, et si je me baigne, c'est encore pire. Une fois, j'ai même entendu le mot "sida" à mon passage.

Parfois, je traite ces réactions par le mépris, mais parfois, je prends la peine d'expliquer ce qu'il m'arrive, en n'oubliant surtout pas de préciser que le psoriasis n'est en rien contagieux. Finalement, les seuls moments où je suis à peu près tranquille, c'est en plein été, quand je m'expose au soleil, car celui-ci améliore nettement les lésions.

Un sentiment d'injustice

Au début, je me suis évidemment posée mille questions : pourquoi cela m'arrive à moi ? Pourquoi maintenant ? Combien de temps va durer la crise ? Comment la gérer ? Quand va survenir la prochaine ? Bien sûr, j'ai consulté un dermatologue, puis d'autres, sans que leurs explications ne répondent vraiment à mes interrogations.

L'un d'entre eux, qui savait pourtant à quel point cette maladie me gâchait la vie, m'a lancé ces trois mots : "Chacun sa croix" ! À part l'application de pommades à la cortisone et des séances sous contrôle médical, ils ne m'ont pas proposé grand-chose. Il a été question, un jour, de me faire tester un nouveau protocole.

Quand j'ai su qu'il s'agissait d'un traitement utilisé en cancérologie, avec des effets secondaires très lourds, j'ai évidemment refusé. Comme je suis d'un tempérament "speed", je me suis souvent entendu dire que mon psoriasis devait être lié au stress. Pour en avoir le cœur net, j'ai suivi une psychothérapie, à un moment où, justement, j'étais en rémission. Six mois plus tard, nouvelle crise !

Sur les conseils de mon psy, j'ai fait des séances d’hypnose avec un dermato qui travaillait beaucoup sur les liens entre les problèmes de peau et les "états d'âme". Je reconnais qu'elles m'ont aidée à régler certains problèmes, mais, malheureusement, pas celui de mon psoriasis. Lors de ma précédente crise — j'en suis aujourd’hui à la quatrième —, je suis même allée consulter une magnétiseuse qui a pratiqué une sorte de massage sur tout le corps, en insistant sur les lésions. Coïncidence ou pas, celles-ci ont régressé au bout de deux mois et demi. Un vrai progrès par rapport aux épisodes précédents.

Je repère les signes avant-coureurs

Au fil du temps, j'ai compris que pour vivre le mieux possible avec cette maladie chronique, il me fallait l'apprivoiser. J'ai donc appris à la cerner, à repérer les signes avant-coureurs et à en prendre mon parti. Connaissant le facteur déclenchant — une angine —, je fais des cures de compléments alimentaires deux fois par an afin de renforcer mes défenses naturelles. Et si un de mes trois fils a une angine, je fais tout pour qu'il ne me contamine pas.

Mais je n'en reste pas moins aux aguets. Au premier ganglion ou lorsque je commence à avoir des difficultés à avaler, je me fais immédiatement prescrire des antibiotiques. Je parviens ainsi, non pas à enrayer la crise, mais à en limiter les "dégâts".

Et surtout, dès que je la sens venir, je vais très vite chez un dermatologue équipé de cabines à UV. De mettre ainsi des cadres est beaucoup moins angoissant pour moi. D'autant que j'ai la chance d'avoir un mari qui me soutient totalement. Mais à la prochaine poussée, c'est décidé : je tente une cure thermale !

Gros plan sur le psoriasis et les stratégies à adopter

3 questions au Pr Jean Flocon, chef d’un service de dermatologie.

D'où vient cette maladie ?

La plupart du temps, il s'agit d'une réaction exagérée des gènes impliqués dans les mécanismes de défense de la peau, qui se met à peler et à s'enflammer. Et plus ces gènes sont "chatouilleux" ou l'agression est importante (changement de saison, angine à streptocoque, pris de poids, stress...), plus le psoriasis est sévère.

Quelles stratégies thérapeutiques peuvent être mises en œuvre ?

Si les pommades et les crèmes hydratantes ne suffisent pas, on dispose d'une panoplie de médicaments, certains classiques, d'autres plus récents, à proposer aux malades. L'idée est d'ajuster les traitements de façon à ce qu'ils leur permettent de retrouver une bonne qualité de vie.

Un conseil à donner aux malades ?

Ne pas se décourager si un traitement les déçoit, car il faut parfois expérimenter plusieurs stratégies avant de trouver la bonne. Et d'être suivi par le médecin qui saura les questionner et les écouter.

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