Un homme sur dix et une femme sur cinq seront touchés par la dépression au cours de leur vie.
Quand on sait que cette maladie est responsable de 50 à 80 % des 9 000 suicides recensés chaque année en France, qu'un dépressif ignore souvent lui-même qu'il est dépressif, on mesure à quel point l'entourage est déterminant pour dépister à temps les tout premiers symptômes de la dépression. D'autant que le changement de personnalité qui s'opère chez un dépressif est radical et qu'il ne peut jamais passer inaperçu.
La dépression peut évidemment surgir à la suite d'un épisode triste (deuil, rupture...) ou douloureux (échec scolaire, professionnel...). Mais elle peut aussi apparaître n'importe quand et parfois sans aucune raison apparente, révélant alors un conflit psychologique profond qui s'installe dans le plus parfait silence.
Or, comme le dépressif a très souvent tendance à penser que ses souffrances psychologiques sont un châtiment qu'il mérite, il éprouve un puissant sentiment de honte qui l'empêche d'en parler. Inutile donc de compter sur lui pour vous avertir qu'il va mal.
Reconnaissez les signes de son mal-être
On sait qu'une personne est dépressive si son humeur et son comportement changent. Elle devient triste, silencieuse, passive, pessimiste. Perdant l'envie de tout, elle s'isole, minée par le sentiment de ne plus intéresser personne. Pour peu qu'on l'interroge, elle avoue alors se sentir coupable. De quoi ? Parfois de gâcher la vie de ses proches avec ses "états d'âme". Parfois encore de rien de très précis, ou plutôt de rien dont elle ait conscience.
Le dépressif voit son sommeil se modifier. Il a des réveils précoces (avec incapacité à se rendormir) ou un sommeil agité (avec réveils fréquents). Ou, au contraire, un excès de sommeil (hypersomnie) dans lequel il va inconsciemment chercher refuge pour échapper à la réalité. Cette hypersomnie laisse la personne aussi fatiguée le matin que si elle avait peu dormi.
Incitez-le à consulter
Vous pensez qu'un proche est dépressif ? Son état se prolonge au-delà d'un mois après un épisode douloureux de sa vie ? Conseillez-lui de consulter son médecin généraliste. S'il est réticent, invoquez le traitement des symptômes qui le gênent (troubles du sommeil, manque d'énergie...). Le médecin est souvent le mieux placé pour lui faire comprendre qu'il est (vraiment) malade. Et vous ne l'effrayerez pas en agitant le "spectre" du psy : il est fragile et n'a sans doute pas envie de se remettre en question pour le moment. Il a de toute façon besoin de soulager sa souffrance avec un traitement adapté. N'hésitez jamais à faire l'effort de l'accompagner dans cette démarche. Un dépressif est en effet incapable de se prendre en charge pendant la phase aiguë de sa "déprime".
Manifestez-lui votre intérêt, votre amour
La grande erreur serait de minimiser ses souffrances ("Tout le monde a des raisons d'être triste") ou de lui asséner des reproches ("Réagis, tu te laisses aller")
Si la personne dépressive a besoin de quelque chose, c'est avant tout d'amour. Le soutien affectif de ses proches reste le moteur essentiel sur lequel un dépressif peut s'appuyer pour rebondir. L'essentiel, c'est donc d'être présent, et autant que possible de rester disponible pour lui offrir une écoute attentive, lui manifester compassion et sympathie. Il ne s'agit pas de le plaindre, mais plutôt de lui faire savoir que ce qu'il exprime est légitime. En un mot, il s'agit avant tout de le déculpabiliser. Au besoin, parlez-lui d'expériences qui vous sont propres pour l'aider à comprendre que l'état dépressif n'est pas une fatalité et qu'il existe des issues. Au cours de vos conversations, aidez-le à identifier ce qui est bon pour lui et ce qui ne l'est pas. Ainsi, il se situera mieux face au monde qui l'entoure, et reprendra progressivement les rênes de son existence.
Trouvez des solutions pour briser sa solitude
Quand on est dépressif, la seule idée d'avoir à sortir et affronter le regard des autres peut angoisser. Si on se laisse aller à son penchant naturel, on risque de s'enfermer de plus en plus profondément dans la solitude. Vous devez empêcher cela, mais pas n'importe comment. Les distractions que vous proposerez à un proche dépressif devront lui faire vraiment plaisir, et elles devront ménager son seuil de tolérance (aux autres, au bruit...), considérablement réduit du fait de sa maladie. Invitez-le à dîner, mais en petit comité. Sortez avec lui, mais dans le cadre d'activités culturelles (exposition, théâtre, cinéma...) qui n'exigent pas trop de contacts. Incitez-le à partager avec vous une activité physique, courte et modérée (une balade, par exemple).
N'oubliez pas que l'essentiel est de lui faire plaisir, qu'il est fatigué et qu'il peut vite se sentir submergé par ses angoisses en n'importe quelle circonstance.
Aidez-le à faire face à son quotidien
Pendant la phase aiguë d'une dépression (un ou deux mois), le dépressif va être totalement écrasé par ses angoisses. Trop en tout cas pour réussir à faire face seul au quotidien et aux responsabilités qu'il impose. Vous allez donc devoir aussi l'aider à réaliser des tâches qui peuvent a priori sembler évidentes : l'accompagner pour faire ses courses, le ménage, l'assister dans ses démarches administratives, déménager s'il vient d'essuyer une rupture, ou encore s'occuper des enfants.
La difficulté, ici, consiste à trouver la bonne façon de s'y prendre sans paraître ni directif ni autoritaire. Ce qui pourrait le braquer s'il éprouvait le sentiment d'être une charge. Là encore, seules l'affection que vous lui portez et la patience pourront vous aider à trouver le ton juste. L'important est que vous manifestiez toujours de la bonne humeur en sa présence (pour signifier que vous êtes content de le faire) et que vous soyez suffisamment compréhensif pour endurer ses sautes d'humeur.
Une personne dépressive peut en effet devenir agressive si elle se sent indésirable ou encore dépassée par les événements. Aider un proche déprimé demande de la patience, de la détermination et parfois même du courage. Si l'on s'investit auprès d'une personne malade, il faudra aussi veiller à s'accorder des moments de répit ou d'évasion.
Quand consulter un psy ?
La psychothérapie est une étape indispensable dans la dépression si le traitement médicamenteux n'a pas donné les résultats escomptés ou s'il y a eu rechute. Or, en temps normal, faire ce type de démarche demande déjà un effort, il est donc compréhensible que, lors de la phase aiguë de la dépression, cette démarche soit d'autant plus difficile. Une fois encore, ce sera peut-être à vous d'aider un proche dépressif à franchir ce pas vers la guérison. Pour y parvenir, commencez par le déculpabiliser en lui expliquant que la dépression n'a rien à voir avec la folie, qu'elle peut affecter tout le monde. Et positivez ce qui peut apparaître à ses yeux comme une faiblesse (dont il a honte) : faites-lui comprendre que les troubles dépressifs sont souvent le fait de personnes très sensibles. Qui peuvent avoir tendance à absorber les malheurs du monde, mais qui révèlent aussi des personnalités exceptionnellement douées d'empathie et d'écoute aux autres.
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