Grossesse : pourquoi les hommes stressent aussi ?

Grossesse Couple
Les hommes se posent mille questions lors de la grossesse de leur femme. Être père, c’est un immense bonheur, mais aussi… quelques angoisses !

Une sensation de mise à l’écart pendant la grossesse

Pendant les neuf mois de grossesse de leur compagne, certains hommes se sentent mis à l'écart et le vivent mal. Une femme enceinte focalise toutes les attentions sur elle, regrettent-ils. « La grossesse est un sujet dont les femmes ne parlent qu'entre elles : elles se racontent leur accouchement, imaginent le bébé à venir... Nous, nous n'osons pas aborder ces sujets, nous n'en parlons pas, cela ne se fait pas. »

Ce sentiment d'isolement, B.Henry, gynécologue-obstétricien, le connaît bien. Les inquiétudes des futurs papas, il les entend depuis 10 ans dans le cadre du groupe de pères qu'il anime. A chaque réunion, ils sont une quinzaine, surtout des hommes qui vont être papas pour la première fois. « Ils posent toujours les mêmes questions », constate le spécialiste. Des questions autour de la sexualité pendant la grossesse, mais également sur la peur que toute l'attention de leur femme se concentre sur son ventre, que le futur bébé devienne le centre de son monde.

Dans leurs propos, les futurs pères se réfèrent toujours à leur propre père, qu'ils prennent comme modèle ou contre-exemple. « Bien sûr, pour certains, tout se passe très bien, reconnaît le Dr Henry. Néanmoins, des hommes peuvent se juger anormaux, penser être un mauvais père ou un amant indigne de ne pas avoir envie d'avoir de relations sexuelles avec leur femme à ce moment-là, notamment à cause de la peur, non fondée, de blesser le fœtus. Alors, quand ils réalisent que d'autres hommes vivent la même situation, Ails dédramatisent. »

Certains cherchent leur place

D'ailleurs, après l'accouchement, beaucoup de participants à ces groupes de parole reviennent pour rassurer les futurs pères : « Ne t'en fais pas, la complicité sexuelle revient comme avant, sinon mieux après la naissance de l'enfant... »

Les femmes comprennent l'intérêt pour leur conjoint de partager ses appréhensions avec d'autres hommes. Parmi les patientes suivies par le Dr Henry, beaucoup lui disent : « Je vais vous envoyer mon mari, cela lui fera beaucoup de bien ! » Cela étant, les hommes s'y décident plutôt spontanément.

Pourquoi tant d'angoisse ?

Selon Hervé Bégard, pédopsychiatre, les hommes manqueraient de modèles qui les aideraient à devenir pères. De nos jours, le père n'est plus seulement le garant moral de la famille, son soutien financier. Depuis presque trente ans, cette référence traditionnelle ne domine plus les relations familiales. Or, aucune définition du père moderne ne s'impose pour autant. Alors, certains se cherchent, quitte à dérouter leur entourage.

Un besoin de rupture pour devenir père

Souvent condamné car incompris, voire incompréhensible, le départ du futur père à l'annonce de la grossesse de sa femme reste une réalité. Pour autant, cette fuite n'est pas toujours dramatique, ni définitive. « L'homme a parfois besoin de ruptures brèves mais significatives pour devenir père, estime le Dr Henry. Cette envie de partir se retrouve chez beaucoup de futurs pères. Il y a différentes façons de le faire : retourner un temps chez sa mère, passer quelques jours avec des amis. Cela peut en dire long sur la peur de l'engagement, la crainte de fonder une famille, de ne pas être à la hauteur. »

Des hommes partent aussi pour protester contre la décision de leur femme d'avoir un enfant malgré leurs refus répétés. Chaque départ est une histoire personnelle : au couple d'en découvrir l'explication, en particulier par le dialogue.

« Si un père vit plus ou moins bien la grossesse de sa femme, qu'il le lui explique, conseille le Dr Henry. D'autant que c'est la femme qui donne la place au père... Bien sûr, la femme enceinte est fragile, de temps en temps elle fond en larmes sur un détail, et le mari se demande alors ce qu'il a fait. Cependant, je crois qu'il faut se parler ou aller parler aux professionnels de la maternité et, si l'on est vraiment mal, ne pas hésiter à consulter un psychologue pour comprendre ce qui ne va pas. »

En effet, dans la majorité des cas, une discussion suffit à apaiser les craintes des futurs papas. Parfois, la grossesse révèle un mal-être sous-jacent qui nécessite une prise en charge type psychothérapie. Parfois, l'attente de la venue d'un enfant entraîne chez l'homme un état particulier. Fatigué, triste, avec une envie permanente de dormir, de rester au lit, sans désir sexuel, le futur père a mal au ventre, grossit. Il est "enceint".

Le Dr Henry analyse ce phénomène comme une façon, pour certains, de devenir pères en imitant inconsciemment la femme. Leur ventre concentre leurs angoisses. Celles-ci se concrétisent par toutes sortes de maux. « Ces comportements se produisent fréquemment avec le premier enfant. Les pères âgés notamment, qui ont à nouveau des enfants vers la soixantaine, vivent souvent cette paternité tardive différemment des précédentes. »

L'échographie "révèle" souvent la paternité

Néanmoins, si certains hommes ressentent leur paternité de façon physique, pour la plupart elle reste avant tout intellectuelle. D'où l'importance de l'échographie. « Beaucoup prennent conscience d'être pères après la première échographie, observe le Dr Henry. Ils ont besoin de cet examen pour entendre les bruits du cœur, pour réaliser que l'enfant est là. »

D'après lui, le fait que les hommes s'investissent de plus en plus dans la grossesse de leur femme réalise « une sorte de rituel, utile pour accéder à la paternité ». Les consultations prénatales, les cours d'accouchement sans douleur... où ils peuvent être présents sont des étapes leur permettant de faire le chemin nécessaire vers l'enfant. Au fur et à mesure, ils se sentent un peu plus pères. L'équipe médicale, les sages-femmes... peuvent aussi les accompagner dans ces moments-là. » Jusqu'à l'accouchement, cet instant magique où le bébé pousse son premier cri.

Et la sexualité ?

Pendant la grossesse, les rapports sexuels évoluent avec le corps de la femme. Quelle que soit la position adoptée, le liquide amniotique protège l'enfant, qui ne peut donc pas être blessé lors des rapports sexuels. Toutefois, en cas de grossesse difficile, par exemple si d'importantes contractions suivent les rapports sexuels, ils pourront être déconseillés sinon espacés, notamment sur avis du médecin traitant.

La grossesse peut aussi être le moment idéal pour découvrir une autre forme de complicité sexuelle, plus câline, plus érotique. Mais si certains hommes aiment le "nouveau" corps de leur femme, d'autres ne s'y habituent pas. L'important est d'en parler afin qu'aucune ambiguïté ne puisse dégrader l'ambiance au sein du couple.

À lire aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. - * Champs obligatoires