Secrets de famille : pourquoi les éviter ?

Secret De Famille
Certains événements traumatisants sont cachés aux enfants, mais finissent toujours par refaire surface. Avec parfois de graves conséquences… On vous dit tout !

Théo est assis sur le divan. Il s'agite, se tortille, n'arrête pas de renifler et jette des coups d'œil inquiets tout autour de lui. Il a sept ans, une petite tête d'ange au regard bleu limpide, mais "Théo est indomptable", pour reprendre l'expression de ses parents. Il ment à sa maîtresse et se montre violent avec ses copains de classe.

« Sais-tu pourquoi tu agis comme ça ? » demande le psychiatre au petit garçon. Il répond par un silence. Mais un silence où pointe la souffrance. La mère de Théo prévient le psychiatre en aparté : « J'ai eu Théo avec mon ex-compagnon qui m'a quittée dès qu'il a su que j'étais enceinte. Bref, son père n'est pas son vrai père. Mais c'est tout comme et, bien sûr, le petit ne sait rien. À quoi ça servirait d'étaler la vérité ? Je vous fais confiance pour garder le secret. »

Les mots sont lâchés : "vérité", "garder le secret" . Des mots qui semblent tapis dans l'ombre, à l'abri de tout soupçon. Mais ils font mal. Même si les parents disent agir pour le bien de l'enfant en gardant enfouie une souffrance passée, le poids d'un secret de famille peut être lourd de conséquences.

Les "suintements" du secret

En effet, « un secret ne peut jamais être gardé, affirme Mehdi Al Mohamad, psychiatre et psychanalyste. Les enfants le pressentent toujours. Comment ? Par des "suintements" même s'il n'y a pas d'échange verbal, il y aura toujours des lapsus, des regards, des silences dans certaines attitudes des parents... »

Ainsi, les personnes qui cachent un secret manifestent un comportement parfois étrange pour l'entourage : ils changent de programme télévisé quand un sujet proche du secret est traité, refusent de faire l'arbre généalogique demandé par l'école à l'enfant qui ignore son adoption... Face aux réactions de ses parents qu'il ne comprend pas, l'enfant utilise ces "suintements" du secret comme des supports symboliques pour son imagination : "Maman me cache des choses. C'est sûrement à cause de moi. C'est de ma faute ! "

Conséquence : il culpabilise en silence, sans pouvoir en parler, et se fragilise peu à peu. En grandissant, l'enfant, tenu à l'écart de certaines discussions, imagine ses parents coupables de terribles méfaits. Il perd alors confiance en eux. Ou bien en lui-même, puisqu'il ne comprend pas ce qui se passe et croit être l'objet de son imagination.

Par le biais du secret, l'enfant découvre aussi le mensonge, la dissimulation, et peut décider de pénétrer le monde des adultes en mentant à son tour. Et le scénario peut ainsi se jouer sur plusieurs générations...

Mère Parle Avec Sa Fille
© istock

Quand et comment en parler ?

Il n'est pas pour autant nécessaire de partager tous les secrets. Ceux qui sont destructeurs sont ceux qui se construisent sur des traumatismes mal surmontés, une souffrance qui n'est pas encore cicatrisée. Or, si quelqu'un ne parle pas de certains événements pour ne pas souffrir, c'est la génération suivante qui souffrira.

Il apparaît alors bénéfique, pour l'équilibre familial et psychologique de chacun, d'en discuter le plus tôt possible avec l'enfant. Dès sa naissance. Même si le bébé ne comprend pas les paroles de ses parents, ces derniers apprennent à trouver les mots pour en parler et seront beaucoup plus à l'aise pour répondre aux futures interrogations de l'enfant et éclaircir ses doutes. En effet, quand l'enfant pose des questions, c'est qu'il pressent déjà des choses. Les paroles des parents ne feront alors que confirmer ses intuitions. Pour ne pas le brusquer, le mieux est de lui demander ce qu'il imagine avoir compris, pour qu'il se représente la situation avec ses propres mots d'enfant.

Aux parents ensuite de recadrer ses intuitions en lui répondant : "Oui, c'est à peu près ça", mais sans pour autant entrer dans les détails. L'important n'est pas de tout dire, mais de faire comprendre à l'enfant qu'il n'est pas responsable de la peine de ses parents et de communiquer autour de cette souffrance familiale.

Que cachent les non-dits ?

Les secrets cherchent à dissimuler des souffrances de nature très différente.

  • Une honte ressentie (l'impossibilité d'avoir un enfant naturel et le recours à l'adoption, à une insémination artificielle)
  • Une atteinte à l'honneur de la famille (un suicide, un inceste, un ancêtre souffrant d'une maladie mentale grave)
  • Une tentative de tourner la page sur une trop grande peine : un deuil, un drame douloureux, une catastrophe naturelle…

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